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Dispositif de sauvetage numérique et photochimique des films de long métrage traités par le Groupe Quinta

Exposé préalable des évènements

Ces trois dernières semaines, le Groupe QUINTA Industries appartenant à Monsieur Tarak Ben AMAR et l’ensemble des Sociétés qui y sont attachées (LABORATOIRE L.T.C., AUDITORIUM SIS, SCANLAB, DURAN DUBOIS, etc..) ont fait l’objet de procédures collectives (Règlement judiciaire et liquidation judiciaire) conduisant au licenciement une grande part des 150 salariés vers le chômage.
Le Groupe QUINTA était un acteur très important du paysage audiovisuel français auquel de nombreux et importants Producteurs de cinéma confiaient leurs travaux de finition (Postproduction et d’effets spéciaux).

L’organisation de ce groupe et ses multiples imbrications ainsi que sa situation économique et financière ont très vite révélé l’impossibilité pour d’éventuels candidats repreneurs de formuler des offres de reprise susceptibles d’assurer la sauvegarde des effectifs salariés.

Le prononcé récent de certaines liquidations judiciaires a placé les salariés dans un total isolement, confrontés à une absence de Direction et de supports matériels (disques durs, serveurs, ..) qui aurait permis d’assurer une continuité ou, a minima de préparer la transition et la sauvegarde des travaux pour les films en cours de postproduction ou encore de livrer les copies film ou numériques aux salles de cinéma.

Conséquences immédiates

– C’est ainsi que la sortie en salles du film de Martin SCORSESE, « HUGO CABRET » failli être annulée, sauvée in extremis par des copies tirées à Rome le lundi précédant

– Que certaines « sorties de films » du 4 et du 11 Janvier sont compromises

– Que 36 films en finition, dont 12 se trouvent dans l’urgence des prochains jours, sont en péril parmi lesquels, de façon non exhaustive, à divers stades de finition :

• LA VERITE SI JE MENS 3 de Thomas GILOU,
• STARS DES ANNEES 80 de Frédéric FORESTIER,
• RENOIR de de Gilles BOURDOS,
• INFIDELE de Jean DUJARDIN, Gille LELOUCHE,
• POPULAIRE de Régis ROINSARD,
• HOLLY MOTORS de Leos CARAX,
• Les SEIGNEURS de Olivier DAHAN,
• MAINS ARMEES de Pierre JOLIVET,
• THERESE DESQUEYROUX de Claude MILLER,
• ASTERIX, AU SERVICE DE SA MAJESTE de Laurent TIRARD
(dont l’importance des effets spéciaux ne peut plus souffrir le moindre retard)
• Et d’autres moins célèbres mais tout aussi vulnérables.

La précision du « séquencement » de chacune des étapes techniques jusqu’aux dates promises de livraison interdit toute défaillance…
L’inquiétude des Producteurs s’amplifie donc à la mesure des enjeux qu’ils portent avec le sentiment que les prochains jours feront apparaître de nouveaux dangers telle LA PERTE DE TOUS LES ELEMENTS NUMERIQUES de leurs films.

CIRCONSTANCE TECHNOLOGIQUE AGGRAVANTE :

La numérisation des images, désormais usuelle, entraine « un stockage en réseau » qui leur ôte toute matérialité.

L’audit technique réalisé par notre Fédération avec la remarquable coopération des responsables techniques salariés du Groupe QUINTA a fait apparaître un RISQUE JUSQUE-LA INSOUPCONNE D’UNE PERTE TOTALE ou QUASI TOTALE DE TOUS LES ELEMENTS NUMERIQUES DES FILMS en cours de traitement ou en finition stockés sur les réseaux de QUINTA et ses filiales.

Pour la 1ère fois de leur histoire, les Industries techniques doivent faire face au sauvetage d’œuvres dont la DEMATERIALISATION rend infiniment complexe leur « localisation physique » et leur « identification numérique ». A la difficulté du procédé et du délai nécessaire à une sauvegarde organisée des éléments s’ajoute la pénurie des supports informatiques.

Les « serveurs » des Société du Groupe QUINTA font déjà l’objet de saisies dont certaines pourraient être exécutées dès cette semaine par les sous-traitants ou les prêteurs, ou encore de « retenues » des bailleurs dans leurs procédures d’expulsion (retenues opérées dans des conditions non vérifiables).

La reprise des serveurs, ou l’absence d’alimentation électrique, entrainera irrémédiablement la perte des données du fait de sauvegardes internes frappées des mêmes risques.

Enfin, l’inventaire des actifs des Sociétés en liquidation ont été évalués par le Liquidateur à un million d’euros.

L’ensemble de ces équipements et réseaux contiennent aujourd’hui près de TROIS CENT MILLIONS D’EUROS de « valeur de production » en cours de traitement, soit 25% de l’investissement annuel du cinéma français !

Une sauvegarde organisée des éléments constitutifs des œuvres demanderait des semaines de travail et les personnels qualifiés disposant de la « mémoire humaine » des procédés en cours… L’acquisition de plus de 500 «Terra-octets » n’étant pas, en cette période de pénurie, la moindre des questions.

Si certaines Sociétés de Production et de Distribution pouvaient faire face économiquement à de tels évènements, d’autres ne le peuvent pas et ne s’en relèveraient pas, entrainant dans leur sillage tous ceux qui les accompagnent.

Au-delà l’urgence soulignée par les Industries techniques depuis deux ans de trouver le soutien du « Fonds Stratégique d’Investissement » pour accompagner leur « rebond économique » dans cette période de violentes mutations technologiques, nous sollicitons prioritairement l’accompagnement des Pouvoirs publics dans la mise en œuvre du PLAN DE SAUVETAGE des œuvres en danger imminent.

Les Industries techniques se sont mobilisées et sont capables dès demain de répondre à chacune des Productions qu’elles ont examinées au cas par cas, en réalisant une analyse et en identifiant les solutions à y apporter :

CHRONOLOGIE DES REPONSES TECHNIQUES

• Sécurisation définitive des Œuvres
• Reprise sans délai des travaux de postproductions et de finitions
de toutes les Postproductions numériques et photochimiques permettant le respect des plannings de sorties en salle de cinéma et le respect des engagements de vente aux distributeurs étrangers
• Intégration de la réalisation des Effets spéciaux urgents (dont le retard accumulé par certains mettent en péril leur programmation)
• Dans une moindre urgence technique, organiser le transfert des œuvres de patrimoine conservées depuis 1935 sur support physique par QUINTA dans des termes à établir en accord avec le Liquidateur.

La FICAM tient à souligner l’engagement remarquable de l’ensemble des Responsables techniques salariés du Groupe QUINTA sans la contribution desquels, malgré leur inquiétude et leur désolation, ce plan de sauvetage n’aurait pu être élaboré.

La mise en œuvre de ce plan de sauvetage impactera significativement l’organisation de nos entreprises, entrainant des surcoûts et des moyens supplémentaires que l’urgence impose.

La difficulté du contexte juridique

Compte tenu du contexte juridique dans lequel est placé le Groupe QUINTA et ses filiales, la libération immédiate de TOUS les éléments détenus de façon matérielle ou immatérielle impose d’y apporter un traitement prenant en compte les obligations du Liquidateur ET la situation des Producteurs.

En conséquence, la FICAM propose 3 dispositifs appropriés à ces circonstances :

1) Les « Prestataires techniques » choisis par les « Producteurs » pour prendre immédiatement en charge leurs travaux deviennent garants des éléments prélevés ou transférés du Groupe QUINTA vis-à-vis du « Liquidateur » et s’engagent à ne libérer les dits éléments qu’après accord de ce dernier.
Les Producteurs et le Liquidateur disposent alors du temps nécessaire à trouver un accord de paiement et solder les encours établis ou à établir.

2) La FICAM se propose de former sous l’égide du Centre National du Cinéma et de l’Image animée (CNC), avec la COMMISSION SUPERIEURE TECHNIQUE et l’ASSOCIATION FRANCAISE DES CHEFS OPERATEURS, un COMITE D’EXPERTS susceptibles d’accompagner entre « Liquidateur » et « Producteur » et contribuer aux issues rapides de situations complexifiées par l’évaluation nécessaire de travaux en cours, par des usages non formalisés ou par l’absence d’une administration commerciale en ordre.
La FICAM suggère par ailleurs que ce Comité soit présidé par le Contrôleur Général des Finances, Monsieur Jacques Yves LEPERS (Auteur d’un récent rapport sur les Industries Techniques).

3) La FICAM invite le Président du Centre National du Cinéma (CNC) à définir avec les ORGANISATIONS PROFESSIONNELS les termes d’une mise en place d’un FONDS SPECIAL DU COMPTE DE SOUTIEN en vue :

a. D’apporter au Liquidateur une garantie totale ou partielle de paiement par « opposition au compte de soutien » de l’œuvre concernée, si une négociation n’avait pu aboutir avec le Producteur dans les délais utiles, mettant en péril la Production – et le nouveau Prestataire technique en désigné par elle – par blocages des éléments.

b. D’apporter aux Industries techniques concernées une garantie spéciale du Compte de soutien si la reprise des travaux d’une Production présentait une réalité de coûts ou de surcoûts dus à l’urgence qui ne figurait au budget ou aux imprévus et risquait d’en hypothéquer le règlement convenu.

Concertation avec l’Institution judiciaire et ses représentants

La mise en œuvre de ce plan de sauvetage exceptionnel demande toutefois d’y associer pleinement l’Institution judiciaire sans laquelle rien ne sera possible.

Il est extrêmement probable que la stricte application des usages dans les diverses phases de liquidation et de réponses aux créanciers (notamment propriétaires de biens confiés), présente une composante de temps incompatible avec le sauvetage des œuvres et l’économie de leurs productions.

La FICAM est consciente de l’immense difficulté qui doit être gérée, dans un calendrier par ailleurs complexe, face à une Institution qui applique les règles du droit.

C’est pourquoi, au regard de la gravité de cet évènement et des conséquences possibles, nous avons l’honneur de solliciter la bienveillante attention de l’Institution judiciaire, dans le respect du droit et des intérêts privés ou publics qu’elle arbitre, pour accompagner l’INDUSTRIE CINEMATOGRAPHIQUE FRANCAISE dans cette épreuve hors du commun et trouver l’issue positive que mérite toutes les formes de la Création.

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A l’heure où le cinéma français est plébiscité par un public qui n’aura jamais été aussi nombreux à découvrir notre Création cinématographique et où le nombre de films produits aura rarement été aussi important, nul ne peut imaginer que l’année 2011 soit entachée d’un évènement qui assombrirait – au-delà de ce que l’on peut imaginer – tout le paysage audiovisuel français.

A cet instant, seule une action collective et déterminée peut répondre à cet enjeu.

Enfin, et afin d’éviter que d’autres évènements ne viennent fragiliser encore un peu plus la filière des Industries techniques sans lesquelles le Cinéma français n’existerait plus, la FICAM suggère que les enseignements utiles soient pris en compte et que les réponses appropriés – et parfaitement identifiées – soient enfin apportées.

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